CANDIDATURE
Personnages : La candidate
Le recruteur
L’assistant
Bureau impersonnel. Le recruteur et la candidate sont assis l’un face à l’autre, séparés par une table. Le recruteur épluche un CV. Un assistant est derrière la candidate, un peu en retrait.
Le recruteur
Ecoutez, je crois que ça va pouvoir se faire. Vous correspondez parfaitement au profil. Ça tombe bien, le poste est à pourvoir de toute urgence.
La candidate
Mais quelle sera exactement la nature de mon travail ?
Le recruteur
L’annonce était lapidaire. C’est voulu. Nous voulions rester discrets pour restreindre le nombre de candidatures. D’où d’ailleurs ce rendez-vous ici ce soir.
La candidate
C’est vrai que l’heure et le lieu m’ont un peu surprise. Et aussi le contrat. D’après l’annonce, c’est un contrat ponctuel.
Le recruteur
Ponctuel soit, mais pouvant se prolonger pour une durée indéterminée. L’homme qui nous a chargés du recrutement, monsieur Parkowsky possède plusieurs boîtes de nuit et…
La candidate
Parkowsky, vous dites ? C’est drôle, ce nom me dit quelque chose.
Le recruteur
Je pensais bien que ça vous ferait réagir. Depuis quelques temps, c’est un nom qui ne laisse pas indifférent. Une publicité dont il aurait préféré se passer d’ailleurs.
La candidate
J’y suis. Il y avait une demoiselle Parkowsky parmi les victimes du tueur à la mandoline…
Le recruteur
Tout à fait. Elle s’appelait Vanessa, Vanessa Parkowsky. C’était sa fille.
La candidate
Je ne voudrais pas être indiscrète.
Le recruteur
C’est public. Je ne vous cache pas que monsieur Parkowsky a du mal à surmonter ce drame. Sa seule et unique enfant. Elle avait à peu près votre âge.
La candidate
Je me mets à sa place. On croit toujours que ça n’arrive qu’aux autres. Le pauvre homme.
Le recruteur
Je lui ferai part de votre marque de sympathie. Je pense qu’il y sera très sensible.
La candidate
Heureusement que le serial-killer a été arrêté. Aucune femme ne sortait plus depuis plusieurs semaines. Moi-même, ce soir, je n’aurais pas osé me rendre à notre rendez-vous.
Le recruteur
C’est un soulagement pour tout le monde. La culpabilité du bonhomme ne fait aucun doute même si, pour le moment, il n’est pas passé aux aveux. Monsieur Parkowsky a eu accès au dossier. Les détails sont assez horribles.
La candidate
Espérons quand même qu’il parviendra à faire son deuil.
Le recruteur
A parler franchement, il n’y arrive pas. Il ne rêve que d’une chose : s’occuper personnellement du tueur.
La candidate
Que voulez-vous dire ?
Le recruteur
Lui infliger ce qu’il a infligé à sa fille. Mais pour cela, il faudrait que ce monstre soit libre.
La candidate
Ce n’est pas demain la veille, dieu soit loué.
Le recruteur
Je comprends votre réaction. Encore que s’il était innocenté et pouvait sortir, il ne représenterait pas un très grand danger pour la collectivité.
La candidate
Comment pouvez-vous dire ça ?!
Le recruteur
Monsieur Parkowsky prendrait rapidement les choses en main. Je ne donne pas cher de la peau de ce monstre.
La candidate
Il est bien parti pour faire de la prison à vie.
Le recruteur
C’est très probable. Mais imaginez qu’alors que cet homme est sous les verrous, d’autres crimes se produisent selon le même mode opératoire, cela aurait tôt fait de l’innocenter.
La candidate
J’ai du mal à vous suivre.
Le recruteur
Il suffirait qu’une ou deux jeunes filles périssent dans des conditions similaires et ce serait des éléments nouveaux de nature à lever les soupçons pesant sur ce monstre. Il pourrait même être rapidement libéré.
La candidate
Ce serait là le fruit d’un invraisemblable hasard.
Le recruteur (très pédagogue)
C’est ce que j’ai expliqué à monsieur Parkowsky. On ne peut pas, lui ai-je dit, pour cela compter sur le hasard.
La candidate (avec un mouvement de recul imperceptible du corps)
Pourquoi me dites-vous ça ? Ça n’a rien à voir avec mon travail !
Le recruteur
Détrompez-vous. Je suis même content que nous ayons abordé le sujet, ne serait-ce que par déontologie (s’adressant à l’assistant) Max, si tu es prêt.
L’assistant enfile des gants puis se lève de sa chaise.
La candidate
Pourquoi enfile-t-il des gants ?
Le recruteur
Parce que vous êtes embauchée.
La candidate
Embauchée ?
Elle regarde l’assistant qui s’est levé et s’approche d’elle très lentement.
Le recruteur (sortant des gants et les enfilant lui aussi, très lentement)
Il faut que vous compreniez : monsieur Parkowsky aimait beaucoup sa fille et il a vraiment à coeur que son assassin soit libéré.
La candidate (regardant alternativement les deux hommes)
Ce n’est pas possible !…
Le recruteur
Pour lui, c’est un deuil qui ne passe pas.
La candidate
Vous ne pouvez pas faire ça ! Ce serait encore plus atroce que ce qu’a pu faire le tueur !
Le recruteur
Je suis d’accord avec vous.
Le recruteur se met debout et rejoint son assistant. Il sort une corde de mandoline de sa poche.
La candidate
Pitié !
Le recruteur
Nous ne faisons qu’honorer un contrat. Par chance, le tueur à la mandoline ne fait pas souffrir ses victimes.
La candidate (paralysée par l’effroi)
Je ne veux pas mourir !
Le recruteur
Nous devons le copier le mieux possible, ce n’est pas chose facile (montrant la corde) Rien qu’acheter une corde de mandoline, par les temps qui courent, c’est suspect.
La candidate
Pitié, ne me tuez pas !
Le recruteur
Calmez-vous, ça va être très rapide.
La candidate (d’un ton éperdu et désespéré)
Non !
Les deux hommes entraînent la candidate dans un coin de la pièce, la dissimulant peu à peu au public. La lumière s’amenuise.
Noir.
Personnages : La candidate
Le recruteur
L’assistant
Bureau impersonnel. Le recruteur et la candidate sont assis l’un face à l’autre, séparés par une table. Le recruteur épluche un CV. Un assistant est derrière la candidate, un peu en retrait.
Le recruteur
Ecoutez, je crois que ça va pouvoir se faire. Vous correspondez parfaitement au profil. Ça tombe bien, le poste est à pourvoir de toute urgence.
La candidate
Mais quelle sera exactement la nature de mon travail ?
Le recruteur
L’annonce était lapidaire. C’est voulu. Nous voulions rester discrets pour restreindre le nombre de candidatures. D’où d’ailleurs ce rendez-vous ici ce soir.
La candidate
C’est vrai que l’heure et le lieu m’ont un peu surprise. Et aussi le contrat. D’après l’annonce, c’est un contrat ponctuel.
Le recruteur
Ponctuel soit, mais pouvant se prolonger pour une durée indéterminée. L’homme qui nous a chargés du recrutement, monsieur Parkowsky possède plusieurs boîtes de nuit et…
La candidate
Parkowsky, vous dites ? C’est drôle, ce nom me dit quelque chose.
Le recruteur
Je pensais bien que ça vous ferait réagir. Depuis quelques temps, c’est un nom qui ne laisse pas indifférent. Une publicité dont il aurait préféré se passer d’ailleurs.
La candidate
J’y suis. Il y avait une demoiselle Parkowsky parmi les victimes du tueur à la mandoline…
Le recruteur
Tout à fait. Elle s’appelait Vanessa, Vanessa Parkowsky. C’était sa fille.
La candidate
Je ne voudrais pas être indiscrète.
Le recruteur
C’est public. Je ne vous cache pas que monsieur Parkowsky a du mal à surmonter ce drame. Sa seule et unique enfant. Elle avait à peu près votre âge.
La candidate
Je me mets à sa place. On croit toujours que ça n’arrive qu’aux autres. Le pauvre homme.
Le recruteur
Je lui ferai part de votre marque de sympathie. Je pense qu’il y sera très sensible.
La candidate
Heureusement que le serial-killer a été arrêté. Aucune femme ne sortait plus depuis plusieurs semaines. Moi-même, ce soir, je n’aurais pas osé me rendre à notre rendez-vous.
Le recruteur
C’est un soulagement pour tout le monde. La culpabilité du bonhomme ne fait aucun doute même si, pour le moment, il n’est pas passé aux aveux. Monsieur Parkowsky a eu accès au dossier. Les détails sont assez horribles.
La candidate
Espérons quand même qu’il parviendra à faire son deuil.
Le recruteur
A parler franchement, il n’y arrive pas. Il ne rêve que d’une chose : s’occuper personnellement du tueur.
La candidate
Que voulez-vous dire ?
Le recruteur
Lui infliger ce qu’il a infligé à sa fille. Mais pour cela, il faudrait que ce monstre soit libre.
La candidate
Ce n’est pas demain la veille, dieu soit loué.
Le recruteur
Je comprends votre réaction. Encore que s’il était innocenté et pouvait sortir, il ne représenterait pas un très grand danger pour la collectivité.
La candidate
Comment pouvez-vous dire ça ?!
Le recruteur
Monsieur Parkowsky prendrait rapidement les choses en main. Je ne donne pas cher de la peau de ce monstre.
La candidate
Il est bien parti pour faire de la prison à vie.
Le recruteur
C’est très probable. Mais imaginez qu’alors que cet homme est sous les verrous, d’autres crimes se produisent selon le même mode opératoire, cela aurait tôt fait de l’innocenter.
La candidate
J’ai du mal à vous suivre.
Le recruteur
Il suffirait qu’une ou deux jeunes filles périssent dans des conditions similaires et ce serait des éléments nouveaux de nature à lever les soupçons pesant sur ce monstre. Il pourrait même être rapidement libéré.
La candidate
Ce serait là le fruit d’un invraisemblable hasard.
Le recruteur (très pédagogue)
C’est ce que j’ai expliqué à monsieur Parkowsky. On ne peut pas, lui ai-je dit, pour cela compter sur le hasard.
La candidate (avec un mouvement de recul imperceptible du corps)
Pourquoi me dites-vous ça ? Ça n’a rien à voir avec mon travail !
Le recruteur
Détrompez-vous. Je suis même content que nous ayons abordé le sujet, ne serait-ce que par déontologie (s’adressant à l’assistant) Max, si tu es prêt.
L’assistant enfile des gants puis se lève de sa chaise.
La candidate
Pourquoi enfile-t-il des gants ?
Le recruteur
Parce que vous êtes embauchée.
La candidate
Embauchée ?
Elle regarde l’assistant qui s’est levé et s’approche d’elle très lentement.
Le recruteur (sortant des gants et les enfilant lui aussi, très lentement)
Il faut que vous compreniez : monsieur Parkowsky aimait beaucoup sa fille et il a vraiment à coeur que son assassin soit libéré.
La candidate (regardant alternativement les deux hommes)
Ce n’est pas possible !…
Le recruteur
Pour lui, c’est un deuil qui ne passe pas.
La candidate
Vous ne pouvez pas faire ça ! Ce serait encore plus atroce que ce qu’a pu faire le tueur !
Le recruteur
Je suis d’accord avec vous.
Le recruteur se met debout et rejoint son assistant. Il sort une corde de mandoline de sa poche.
La candidate
Pitié !
Le recruteur
Nous ne faisons qu’honorer un contrat. Par chance, le tueur à la mandoline ne fait pas souffrir ses victimes.
La candidate (paralysée par l’effroi)
Je ne veux pas mourir !
Le recruteur
Nous devons le copier le mieux possible, ce n’est pas chose facile (montrant la corde) Rien qu’acheter une corde de mandoline, par les temps qui courent, c’est suspect.
La candidate
Pitié, ne me tuez pas !
Le recruteur
Calmez-vous, ça va être très rapide.
La candidate (d’un ton éperdu et désespéré)
Non !
Les deux hommes entraînent la candidate dans un coin de la pièce, la dissimulant peu à peu au public. La lumière s’amenuise.
Noir.